Bien que retranchés dans les contrées les plus reculées et les plus hostiles, les communautés montagnardes ont toujours su faire preuve de solidarité pour échapper aux nombreuses catastrophes liées aux risques spécifiques du milieu montagnard. L’environnement particulier de la montagne a développé chez les hommes, vivant dans les conditions les plus rudimentaires, un esprit d’aide et d’assistance.

Évolutions du Secours en Montagne

 Au XIXe siècle, les plus hauts sommets des Alpes attire la convoitise d’une nouvelle génération de montagnards : « les conquérants de l’inutile ». Cette nouvelle pratique de la montagne pousse les hommes à aller toujours plus loin et plus haut dans la quête de nouveaux sommets vierges. Cela entraîne, inévitablement, des accidents auxquels les montagnards n’étaient pas confrontés auparavant. Face à ce phénomène nouveau, la traditionnelle solidarité montagnarde pour porter secours aux personnes en danger ne fait défaut mais cela va obliger les sauveteurs à s’organiser.


Le 14 juillet 1865, une cordée de 7 alpinistes formée par le célèbre Edward Whymper réussit l'ascension du Cervin. Cependant, au cours de la descente, 4 des 7 alpinistes chutent et disparaissent dans la face nord du Cervin. Trois alpinistes sur quatre sont récupérés et redescendus à ZERMATT (Suisse) par des sauveteurs bénévoles. Devant l'ampleur de ce drame, le gouvernement du Valais ordonne qu’une enquête soit diligentée afin de connaître les circonstances exactes de cet accident. Edward Whymper est entendu par des fonctionnaires suisses. Le premier procès-verbal d’audition officiel d'accident de montagne vient de voir le jour mais de nombreux éléments de doute sur les circonstances de l'accident subsistent. En cette fin du XIX ème siècle, l'importance des constatations à l'occasion d'un accident de montagne apparaît déjà primordiale pour la recherche des différentes responsabilités. Ce drame va conduire les alpinistes à s’interroger sur l’organisation des opérations de secours en montagne.


Dès 1897, le premier groupe organisé de bénévoles se forme avec les « Sauveteurs Volontaires du Salève ».

Il faut ensuite attendre 1910 pour que soit créée la première association de secours en montagne dans le Dauphiné sous l’égide du syndicat d'initiative de la ville de GRENOBLE (Isère) : le « Comité dauphinois de secours en montagne ».


En 1929, le comité de secours de la Savoie est créé à CHAMBERY (Savoie) suivant l’exemple du Dauphiné.


En 1946, la Fédération française de la montagne réunit toutes les sociétés de secours en montagne.


Il faut qu’une tragédie dans le massif du Mont Blanc se produise pour voir l’État s’investir dans le secours en montagne par le biais de ses services. A la fin du mois de décembre 1956, les Italiens Bonatti et Gherser, le Belge Henry et le Français Vincendon sont pris par la tempête sur le Grand Plateau à plus de 4000 m, une centaine de mètres sous le sommet du Mont Blanc. Seule la cordée italienne réussira à rejoindre COURMAYEUR (Suisse). Sur le versant français Vincendon et Henry sont repérés par un hélicoptère mais l'appareil envoyé pour porter secours s'écrase avec son équipage à proximité de la cordée en détresse. Il faudra le concours d'un second hélicoptère pour évacuer le pilote et le mécanicien atteints de graves gelures. Quant à Vincendon et Henry, ils ne pourront pas être rejoints et décèderont sous le regard impuissant des secouristes dans la vallée de CHAMONIX (Haute-Savoie).


 Cette affaire a provoqué une grande émotion au niveau de la population et des pouvoirs publics témoins de ce drame. L’organisation du secours en montagne prend alors une nouvelle orientation et la notion de service public apparaît. Sous la direction des Préfets de départements, les services de la gendarmerie et des compagnies républicaines de sécurité, en collaboration avec les sociétés de secours en montagne, sont chargés officiellement de la mission de secours en montagne par une circulaire ministérielle du 21 août 1958. Elle impose aux Préfets l’organisation du secours en montagne et l’élaboration d’un plan spécialisé de secours. Le premier PSHM a été Chamonix en 1958 (qui deviendra ensuite un PGHM).

Chronologie du PGHM de l'Ariège

Depuis sa création en 1971, le PGHM n’a cessé d’évoluer. D’un effectif initial de 6 sous-officiers et 15 gendarmes auxiliaires (service militaire), nous sommes passés à 01 officier, 13 sous-officiers et 3 gendarmes adjoints volontaires (renforts non spécialistes sous contrat). Sans semer le doute sur les grandes qualités des anciens de 1971, le PG n’a de cesse de se perfectionner et d’être plus professionnel.

  • 1971 : Création en Ariège d’une unité secours, « le Peloton de Gendarmerie de Surveillance en Montagne de Savignac », rattaché à la compagnie de Foix.
  • 1974 : Avalanche de Pailhères endeuillant l’unité (3 morts : Luc BORDENAVE, Philippe LESAUVAGE et Gilbert PEYRAUD).
  • 1991 : Création de la spécialité montagne en gendarmerie.
  • 1992 : Le PGSM devient PGHM et est placé sous l’autorité du commandant de groupement. Mise en place du premier détachement aérien estival en Ariège, à Pamiers.
  • 1993 :
    • Premier détachement aérien estival à Savignac.
    • Création d’un plan départemental de secours en Ariège.
  • 1995 : Construction d’un nouveau casernement à Savignac.
  • 1999 : Premier détachement aérien hivernal à Savignac.
  • 2002 : Refonte du plan départemental de secours en montagne ariégeois, confirmant les prérogatives de la gendarmerie en matière de secours en montagne.
  • 2004 : Mise en place du détachement aérien saisonnier à Pamiers-Les-Pujols (été et hiver).
  • 2012 : Mise en place d’un Détachement Aérien Permanent à Pamiers-Les-Pujols
  • 2017 : Nouveau chenil double au PGHM à Savignac.

Au cours de la conception du site j’ai tenu à faire une page historique « comme tout le monde ». Il m’est rapidement apparu que l’histoire du secours en montagne était déjà décrite dans de nombreux ouvrages et sites internets. Les grandes lignes de l’histoire, certes, parfois plus détaillées, mais pas toute l’histoire…En effet il existe un petit massif montagneux où chaque année des hommes réalisent des milliers de secours, et ce depuis trente ans, et dont l’histoire n’existait pas ! Ces petites montagnes, 450 kilomètres de long à peine, avec de nombreux sommets culminants à plus de 3000 mètres, ont elle aussi connus leurs tragédie, leurs joies, leurs héros anonymes d’un jour. Parce que pour évoluer, pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient, parce que le secours en montagne s’adapte sans cesse grâce aux évènements passés, « Parce qu’un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir » Ferdinand Foch, c’est pour ces raisons que j’ai voulu raconter l’histoire de ces hommes, une histoire qui date d’hier à peine. Loin de moi l’idée aujourd’hui de vous conter toute l’histoire du secours en montagne dans les Pyrénées. Il fallait trouver un point départ, et c’est tout naturellement que je me suis demandé que se passait-il hier dans les Pyrénées Ariégeoises ? Que faisaient les gendarmes secouristes ? Qui étaient-ils ? Pour répondre à ces questions je me suis tourné vers ces jeunes retraités. J’ai donc rencontré Marcel GALIN , un des gendarmes qui était à la création du peloton de gendarmerie de montagne de l’Ariège. Il a bien gentiment accepté de venir s’entretenir avec nous. Il est arrivé un dimanche matin dans les locaux actuels du PGHM, souriant, se demandant sûrement ce que j’attendais de lui. Voici une partie de son histoire.


  • PGHMARIEGE.COM : Marcel GALIN, racontez-nous vos débuts en Ariège ?
  • M.G.: Pendant l’école gendarmerie j’ai passé des tests de sélection montagne à Chamonix et j’ai été affecté dans une brigade de montagne à Ax les Thermes en 1966. A l’époque c’était les brigades qui faisaient le secours en montagne en Ariège. On faisait aussi le secours sur piste en hiver. On partait une semaine aux Monts d’Olmes, et à la journée au Saquet et à Pailhères. On était 10 gendarmes et ensuite nous sommes passés à 12. Moi, jeune gendarme, on m’envoyait à Pailhères car le Saquet c’était réservé pour les anciens. La semaine il n’y avait pas un chat alors je m’entraînais en peau de phoque et c’est comme ça que j’ai pu battre les anciens à la patrouille alpine.


  • PGHMARIEGE.COM : En quoi consistait cette patrouille ?
  • M.G.: Il y avait du géant, du ski de fond et des manœuvres de secours avec une perche. Cela se déroulait vers la mi-mars chaque année sur une station différente de la chaîne. On voyageait à l’époque !(ndlr : Appelé aussi le chalenge, il s’agissait d’un chalenge régional qui avait pour but de « mettre en relief et compl&eacue;ter les possibilités des formations de montagne de la gendarmerie et de développer l’esprit d’équipe et les liens de camaraderie entre les participants.(…)Toutes les unités de montagne de la gendarmerie de la Région y sont représentées : brigade, pelotons de montagne, escadrons de gendarmerie mobile.» Chef d’escadron AUCLAIR)

 

  • PGHMARIEGE.COM : Concernant les secours sur pistes, ça devait pas être simple ?
  • M.G.: Pour l’hiver il y avait le traîneau pourcher. C’était un officier des chasseurs alpins qui l’avait inventé. C’était une joie terrible au téléski. On entourait la corde autour de la perche du téléski. Avec le poids des fois les skis ne touchaient pas terre ! Il ne fallait pas être un manche. Un jour à mes débuts, un Adjudant je crois, m’a dit : « regarde, je vais te montrer comment on fait » et il a fait le tour de la poulie retour avec la perche. Des fois le type n’était pas blessé au départ mais à la fin il l’était ! C’était aussi avec ce traîneau que nous faisions les épreuves du challenge, alors on s’y entraînait régulièrement. Pour aller vite, chacun avait sa mission, l’un les goupilles, l’autre la bâche etc…

 

  • PGHMARIEGE.COM : Comment se déroulait les secours en montagnes estivaux ?
  • M.G.: Au départ il n’y avait que Argeles-Gazost qui avait vraiment une unité de secours, qui intervenait d’ailleurs sur toutes les pyrénées quand c’était grave. Ils existaient déjà en 1966. Ils s’entraînaient à l’ETAP de Pau. En 1969, il me semble, ils étaient venus avec l’alouette 2 pour l’accident sur l’arête Est de la Dent d’Orlu. J’y étais aussi. Je me souviens, on y avait passé la nuit ; moi j’avais pas grand chose comme équipement et les types d’Argelès guère plus…Et puis l’alouette 2 a pu venir nous chercher. C’était épique, ils avaient enlevés les portes et il n’y avait pas de treuil. Pour monter à l’intérieur quand tu es sur une arête c’est quelque chose. Je me demande encore comment on ne s’est pas mis au tas. Cela me rappelle une intervention vers le Roc Blanc, il y avait tout qui vibrait dans la machine et le pilote qui disait je ne sais pas si on va y arriver, je ne sais pas si on va passer. Certains pilotes n’étaient pas en confiance en montagne. Une autre fois on est allé chercher un type à l’arête Est du Valier, en janvier. On l’avait repéré sous un surplomb et le pilote a réussi à nous déposer sur l’arête avec tous le matériel : treuil, corde, etc… Cependant on ne faisait pas beaucoup de secours, peut être 20 ou 30 par été. C’était souvent des portages avec la perche barnaud et quand tu avais un mec de 80 kilos c’était dur… Puis en avril 1971, le secours en montagne ariégeois s’est professionnalisé avec la création du peloton de gendarmerie de montagne de l’Ariège. Nous étions sept. Cela correspondait aussi aux débuts des gendarmes auxiliaires. En septembre de la même année nous en avons reçu 21. Il fallait les utiliser alors on faisait beaucoup de surveillance en montagne.


  • PGHMARIEGE.COM : Quelle était la formation des gendarmes ?
  • M.G.: Au départ il y avait le brevet d’alpiniste militaire (BAM) et le brevet de skieur militaire (BSM) à Cauterets. Ensuite tout se faisait à Chamonix, à l’Ecole Militaire de Haute Montagne. Cela commençait par les qualifications hiver et été, puis instructeur hiver et éteacute;, aide-moniteur pour l’hiver, puis moniteurs guide. A l’examen final du stage de moniteur guide, il y avait un gars de l’Ecole Nationale de Ski et d’Alpinisme détaché et si on était bon, on avait par équivalence l’aspirant-guide. Après il fallait faire une liste de 50 courses pour se présenter au guide à l’ENSA. Puis en 1991, quand ils ont crée la spécialité montagne, ils ont testé tous les vieux croûtons pour les virer. Mais comme il y en avait des plus mauvais que nous on est restés…